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Je te connais comme un homme dur

15 novembre 2020, par Jean-Louis Cathala

Matthieu 25, 14-30 15.11.20

Après la Parabole des dix vierges entendue dimanche dernier (Mathieu, chapitre 25, versets 1 à 13), le premier évangile nous donne à méditer une seconde grande parabole de vigilance avant de nous ouvrir à la contemplation de la fresque finale de la venue du Fils de l’homme ( versets 31 à 46).

Aimez-vous la page d’Évangile de ce jour ? Moi, (Dieu me pardonne !), a priori, pas beaucoup ! La parabole dite « des talents » (« des mines » dans une version parallèle de Luc) nous apparaît comme une catéchèse menaçante élaborée par une communauté chrétienne du 1er siècle. Ces paroles sont mises rétroactivement sur la bouche de Jésus et font certes authentiquement partie de l’enseignement scripturaire de l’Église primitive inspirée par l’Esprit Saint, mais la plupart des exégètes ne pensent pas que ce sont des phrases qui auraient été effectivement prononcées par le Seigneur (Dieu merci !), si ce n’est, peut-être, dans un état primitif plus court et dans un esprit plus cohérent avec le Jésus historique, celui qui révèle un Dieu Père qui fait bon accueil à tous. A qui s’adresse la parabole des talents ? Pas aux disciples de la première génération, mais plutôt, sans doute, à des gens de la deuxième génération (disons après les années 60 du 1er siècle) qui commencent à en avoir vraiment marre d’attendre la parousie, la venue du Christ en gloire. Ils attendent et rien ne se passe ; ils ne seront pas les derniers ! La catéchèse de ce récit pointe ainsi les différentes attitudes que les uns et les autres adoptent : Faire malgré tout fructifier les dons et la foi baptismale ou alors perdre patience, perdre confiance, être moins assidu à la communion fraternelle et aux prières, se distancer de cette nouvelle communauté un peu bizarre et peut-être même s’en séparer pour revenir à une religion d’Israël moins exaltée, centrée sur l’interprétation de la Torah. Ce n’est pas pour rien que la sentence finale de notre parabole (Matthieu chapitre 25, verset 30) rappelle celle réservée aux fils du Royaume, l’immense majorité des Enfants d’Abraham, d’Isaac et de Jacob qui n’ont pas reconnu Jésus comme le Messie (chapitre 8, verset 12).

Mais ce récit concerne aussi d’âge en âge tous les croyants. L’enjeu essentiel ici, c’est l’image de Dieu  : ce qui fait le malheur du « serviteur bon à rien  », c’est de dire à son maître : « Je te connais comme un homme dur  » (chapitre 25, verset 24) ; cela tourne mal pour lui parce qu’il est habité par une image perverse de Dieu, un peu comme ces gens qui attrapent plus facilement le Covid parce que leur système immunitaire n’est pas bon. A contrario, c’est la conscience heureuse que Dieu est amour et qu’il m’aime tel que je suis qui me permet de donner le meilleur de moi-même, de prendre de beaux risques dans ma vie, de faire fructifier tous les dons reçus. C’est ce que nous nous souhaitons les uns aux autres, n’est-ce pas ?