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Diocèse de Montpellier

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Donner ses fruits (Mt 21, 33-43)

9 octobre 2017, par Jean-Louis Cathala

« Finalement, il leur envoya son fils »

Dans les Écritures, la « vigne », c’est Israël – disions-nous voici quinze jours - et c’est aussi son accomplissement : le Royaume de Dieu. Dans cette parabole, il y a d’abord des personnages : le maître de la vigne, les vignerons, les serviteurs et le fils. Il y a un décor : la vigne, avec sa clôture, son pressoir et sa tour. Et puis il transparaît dans tous ces versets un grand désir : donner des fruits ; recevoir des fruits, Enfin, on nous parle d’une pierre angulaire. Je reprends 4 expressions : les serviteurs, le fils, les fruits et la pierre.

Première expression : les serviteurs  (Matthieu, chapitre 21, versets 34 à 36) : Ce sont les prophètes, souvent assassinés au temps des Rois d’Israël et de Juda (1 Rois, chapitre 18, verset 4. Lire surtout : Jérémie, chapitre 7, verset 25). Dans cette parabole, Jésus lit sa propre histoire et entrevoit sa mort dans la lignée des prophètes persécutés. Il ne glorifie pas son peuple dans une histoire officielle. Il n’épargne pas les grands prêtres et les Pharisiens, qui d’ailleurs se sentent visés. Au chapitre 23, le Christ aura même des paroles très dures pour certains hypocrites : « Vous êtes les fils de ceux qui ont assassiné les prophètes » (Verset 31).

Deuxième expression : le fils (chapitre 21, versets 37 et 38). C’est le personnage central du Prologue de l’Épître aux Hébreux : «  Après avoir…parlé jadis aux Pères par les prophètes, Dieu, en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par un fils, qu’il a établi héritier de toutes choses… » (chapitre 1, versets 1 et 2) Ce fils a le même travail que les autres serviteurs : veiller à ce que les fruits de la vigne soient remis au propriétaire. Mais en plus, il est l’héritier, ce qui le rend plus dangereux encore aux yeux de ces vignerons sans scrupules. Il faut donc le jeter hors de la vigne ! Sans doute une allusion à la mort de Jésus, qui en ce chapitre de Matthieu entre sous les acclamations dans Jérusalem, mais qui sera crucifié « hors de la porte », comme le dira la même Épître aux Hébreux (chapitre 13, verset 11).

Troisième expression : les fruits. Allons dans les détails ! Pour Matthieu, à la différence de Marc et de Luc, il ne s’agit pas simplement de rendre une part des fruits, mais tous les fruits ! (chapitre 21, verset 34) Ainsi, le premier évangile évoque une récolte qui réalise la volonté originelle du Créateur, qui selon le Livre de la Genèse crée un arbre tout entier fruit (chapitre 1, verset 11) à la différence de la terre qui ne produit qu’un arbre-faisant-fruit (nuance !), accomplissant ainsi la première désobéissance (verset 12). La Genèse, d’ailleurs, éclaire aussi quelques versets plus hauts la malédiction du figuier qui n’a que des feuilles (Matthieu, chapitre 21, versets 18 et 19). Notre parabole va loin ! Elle nous parle de toute l’histoire du salut. Le souhait du maître de maison de recevoir tous les fruits, c’est le grand désir de Dieu de tout réconcilier, y compris la première désobéissance.

Enfin, quatrième expression : la pierre. Matthieu fait peut-être ici allusion à la deuxième destruction du Temple, en l’année 70. De même qu’au moment de la première destruction on avait selon la tradition juive (Michna yoma 5, 2) caché la pierre d’angle pour la reconstruction après l’Exil, de même le Christ est la pierre qui résiste pour bâtir un Temple nouveau : les pierres vivantes de sa communauté ! Cette citation du Psaume (117 (118), 22-23) et de la pierre de faîte nous dit bien que le dessein de l’histoire du salut ne sera pas mis en échec. Par la Résurrection du Christ, Dieu guérit toutes les persécutions faites à ses envoyés de tous les temps.

Et que conclure pour nous ? Tout ce qui nous est donné est donné pour être offert. Nous sommes de simples métayers sur la terre.