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Diocèse de Montpellier

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Texte Moingt 108… : La Kénose du Verbe

24 novembre 2023, par Jean-Louis Cathala

( NDLR : Kénose du grec Kenôsis : « action de rendre vide, d’anéantir ». Terme théologique pour exprimer l’ anéantissement dont il est question dans le passage des Philippens : « Il s’est vidé lui-même, prenant forme d’esclave... » (2, 7))

Le Verbe « par qui tout a été fait » est arrivé au bout de sa course à travers le monde, il est devenu l’une de ces choses faites par lui. C’est d’abord pour dire cela que les Pères ont parlé de « kénose »  : en ce sens non qu’il se serait vidé de ce qu’il est, anéanti, mais qu’il s’est identifié à ce qui n’est pas, abaissé au plus bas, à cette extrémité de l’être qui, par rapport à « Celui qui est » par soi-même, n’est en soi que néant. Mais il n’a pu s’identifier à autre chose qu’en restant lui-même  : cette relation au Père qui subsiste indestructiblement de l’Amour qu’il reçoit de lui. S’identifiant à cet homme qui passe, il lui communique son caractère personnel : il lui assigne pour devoir-être de passer de ce monde à son Père, du néant de l’être à la vie éternelle, il ouvre en lui le passage par où tous les hommes pourront s’arracher à la mort et accéder à la béatitude du Père. L’incarnation est, en cela même qui advient en elle, événement de révélation : elle dit ce qui se fait en elle et par elle, « le pouvoir de devenir enfants de Dieu » (Jn 1, 12) donné à tous ceux qui croiront au Verbe fait chair. La kénose du Verbe prend ici une seconde signification : transférant en Jésus sa relation au Père, il s’efface derrière le Père. De même que dans le cours de la révélation antérieure, le Verbe ne se manifestait pas pour lui-même, ne parlait pas de lui ni en son nom propre, mais s’employait à faire connaître et aimer le Père, son Alliance et sa Loi, de même il s’identifie à Jésus naissant en exprimant en lui le Oui du Père à ce qui fut fait par le Verbe, le Oui créateur qui devient, dans l’incarnation, le Oui de l’adoption filiale (…) On peut aussi parler ici (avec Jüngel) du « sacrifice » auquel le père livre le Verbe et auquel celui-ci consent (mais sans le charger de tout le poids religieux du mot) : le Père se dessaisit du Verbe qui a quitté sa « demeure » d’éternité pour devenir un habitant du monde de la ténèbre, il nous l’abandonne en gage de son amour, et le Verbe accepte cet exil, auquel il s’offrait depuis toujours (…) (Il) communique à Jésus son propre caractère de Révélateur du Père, et Jésus devient en lui-même la vivante révélation du Dieu-pour-nous, de l’amour du Père pour tous les hommes.

Joseph Moingt – Dieu qui vient à l’homme – T. 2, Vol. 1 -Cerf 2012 – pp. 404-40