Texte Moingt 91… : Le mal moral

On constate (…) l’existence d’un mal moral, qui ne se réduit pas à la masse des fautes individuelles ni à l’influence mauvaise des uns sur les autres, mais que beaucoup de gens expérimentent comme une force qui s’empare d’eux, les subjugue et les pousse, sans qu’ils réussissent à lui échapper, à toutes sortes de méfaits, de passions aveugles, d’actes aberrants, de crimes monstrueux ; et cette force mauvaise exerce ses ravages sur des sociétés et des cultures entières, soit qu’elle se répande sournoisement au gré de courants de pensée ou de tendances de masse, soit qu’elle provoque des explosions historiques terrifiantes, dont Auschwitz est l’exemple typique. L’existence d’une telle force de Mal n’est pas niable et elle sera conçue comme une réalité collective et transindividuelle, sans avoir besoin d’en faire une Puissance cosmique ni personnelle (…) Il ne suffit pas d’en donner une explication phénoménologique ni sociologique, car la foi perçoit cette force de mal en lien avec le projet créateur et sauveur de Dieu, contre lequel elle se dresse (…) Le mal, (…) c’est la volonté impérialiste d’étendre la suprématie du moi sur tous les autres (…) Ce mal est péché en cela qu’il s’oppose fondamentalement au projet de Dieu de rassembler les hommes et les sociétés dans une communion fraternelle où il pourrait demeurer tel qu’il vit en lui-même ses relations trinitaires, en attendant que l’humanité, unifiée par la participation à son amour, parvienne à demeurer éternellement dans la pleine communion à la vie trinitaire.