Texte Moingt 33… Un Dieu venu du fond des âges

A mesure qu’il se constituait en religion, en s’inspirant de celle de l’Ancien Testament, le christianisme se façonnait un sentiment de Dieu analogue , sous des traits particuliers, à celui qui s’exprime en d’autres religions : Dieu lointain et redoutable dont l’approche est interdite autrement que par l’institution sacerdotale, Dieu de domination dont (…) les châtiments (sont) rappelés par l’institution pénitentielle, Dieu qu’on peut apaiser et se rendre favorable en lui offrant un culte sacrificiel, Dieu qui règne sur son Peuple par l’intermédiaire d’un Prince dont il sacralise l’autorité, Dieu qui perpétue son règne par la continuité et la force des traditions familiales et sociales. Se confectionnant une figure religieuse, qui ne trahissait peut-être pas l’esprit de l’Évangile mais qui n’y avait pas non plus, comme telle, ses racines, adoptant avec elle une idée de Dieu venue du fond des âges par les voies les plus diverses, le christianisme s’exposait à de futures contestations et révisions critiques qui donneront naissance à bien des déchirements, plus tard à la Réforme, et à d’autres conflits de nos jours. Il liait si étroitement la croyance en Dieu à l’autorité d’une religion, elle même adossée à la puissance politique, qu’un temps vint où des hommes voulurent se libérer de l’une pour s’affranchir de l’autre.