Texte Moingt 74 : L’humain cocréateur de son humanité

La création de l’homme à l’image de Dieu ne peut pas être considérée comme effectivement accomplie du seul fait de Dieu,dans le seul instant de l’acte créateur d’un premier homme, mais elle requiert aussi, et non moins nécessairement, le fait de l’homme, sa libre participation à l’acte qui l’institue homme, qui l’ordonne à être tel, son acquiescement (…) ; et cette coopération de l’homme à l’acte créateur est coextensive à la durée de sa présence au monde. En d’autres termes, l’homme est créé cocréateur de son humanité,parce que la vérité de l’humanité est la liberté d’une aventure spirituelle, et la création de l’homme, toujours envisagée dans la perspective de sa ressemblance à Dieu, doit être conçue comme une activité continue de Dieu Trinité, qui n’est pas de l’ordre de la causalité, mais de la relation, comme il en est des actes originants à l’intérieur de la Trinité, et il ne saurait en aller autrement, dès lorsqu’il a décidé de faire l’homme par mode de reproduction, « comme à notre ressemblance » (Gn 1, 26) (…) Pour se faire à la ressemblance de son Créateur, l’homme aura besoin de voir le modèle qu’il doit reproduire, c’est-à-dire de connaître Dieu pour ordonner sa liberté et son amour selon le plan de ses volontés, et donc Dieu, en le créant,s’engage à se révéler à lui. Mais l’homme réussirait-il à « imiter »Dieu autant qu’il lui est possible, que cela ne suffirait pas à le rendre image vraie de Dieu, car rien de mortel ne saurait prétendre à unetelle dignité, alors que Dieu est, par essence, le Vivant et l’homme,par condition, voué à la mort. Le créant pour être son image, Dieu s’engage donc à sauver l’homme de la mort.

_{Joseph Moingt -Dieu qui vient à l’homme- T. 2, Vol. 1 – Cerf 2012 – pp. 204-205}