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Diocèse de Montpellier

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Consacrés ? (Lc 2, 22-40)

3 février 2019, par Jean-Louis Cathala

Derrière ce récit de la Présentation de Jésus au Temple, nous percevons un monde religieux complexe et je ne suis pas sûr de pouvoir vous en parler d’une façon claire et accessible. Mais je me lance, au risque d’être un peu long !

Tout d’abord, les anciens le savent, le texte évoque la purification de Marie. Pour comprendre de quoi il s’agit, il suffit d’aller voir les prescriptions du Livre du Lévitique chapitre 12, versets 2 à 8). Bonne lecture !

Ensuite, ce récit évoque la consécration de tout garçon « premier-né ». Vous irez consulter le Livre de l’Exode (chapitre 13, verset 2 et versets 13b-15). Au fondement de toute religion sacrificielle, afin de remercier la Divinité source de tout bien, on lui offre le meilleur : les premiers fruits de la récolte et les premiers-nés mâles de l’animal et de l’homme. Dans le souvenir de leur libération, les enfants d’Israël le feront aussi pour compenser le fait que leurs premiers-né furent épargnés au moment de la sortie d’Égypte. Concrètement, les premiers-nés des animaux sont offerts en sacrifice (sauf quand ils sont impurs) et les premiers-nés de l’homme sont « rachetés », puisque Israël refuse les sacrifices humains. En quoi consiste ce rachat  ? Offrir un animal à la place, comme dans le récit de la ligature d’Isaac (Genèse, chapitre 22). Mais on a aussi donné en substitution les Lévites consacrés au service de YHVH (Voir Nombres, chapitre 3, verset 4). Et puisque le nombre des premiers-nés excédait de beaucoup celui des Lévites, on rachetait plus prosaïquement les premiers en donnant de l’argent pour les prêtres ! ( chapitre 18, verset 17).

Vous voyez un peu le décor ? De là à considérer que sur la Croix, Jésus aurait été sacrifié à notre place, il n’y a qu’un pas que certains, hélas, ont franchi. Pourtant, le « rachat », c’est aussi tout autre chose ! Dans le Livre d’Isaïe, Dieu est perçu comme le Go’el - littéralement : « celui qui rachète » - comme le Rédempteur au sens où il protège l’opprimé et libère son peuple (chapitre 41, versets 13 – 14). C’est cette théologie-là que la foi chrétienne recevra pour considérer que le Christ est aussi Rédempteur. En ce sens, oui, nous sommes rachetés par la vie, par le don d’amour, par la résurrection et par le retour tant attendu du Messie.

Je voudrais évoquer un autre aspect : Depuis l’Incarnation, cela n’a plus de sens de « consacrer » certaines personnes ou d’en faire des Lévites ; d’ailleurs, le Temple a été détruit ! Par son incarnation, Dieu s’est « incrusté » dans la vie ordinaire de tout être humain. Toutes et tous lui appartiennent. Le seul Premier-né, c’est le « Premier-né d’entre les morts » en qui nous sommes tous et toutes sauvés et relevés pour annoncer l’Évangile, que nous vivions seuls, en communauté ou en couple. Désormais, les choses ou les personnes « sacrées », c’est fini ! Dans l’Église, l’Esprit suscite une grande diversité de charismes ou de services, mais il ne saurait y avoir des gens qui seraient « consacrés » et d’autres qui ne le seraient pas ou qui le seraient moins. Laissons ce langage et ces catégories à une religion sacrificielle déjà critiquée par les Prophètes et pulvérisée par le Christ !

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