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Diocèse de Montpellier

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La Bible dit-elle vrai ?

28 avril 2020, par Jean-Louis Cathala

( Quelques extraits d’un livre de François Brossier – collection La Bible tout simplement – éditions de l’atelier/éditions ouvrières 1999- 164 p. Une lecture qui peut-être nourrira l’intelligence de la foi de ceux qui prétendent croire et qui peut-être nourrira l’intelligence de ceux qui pensent ne pas croire…)

Ce qui fait l’unité et l’originalité profonde de la Bible vient de ce que son cadre est essentiellement narratif. (Elle) ne se présente pas, en effet, comme une réflexion théorique sur Dieu, l’humanité et son destin ; elle affirme une conviction : le Dieu dont elle parle est venu se mêler à l’histoire des hommes. Dans ces conditions, dire Dieu, dire son dessein pour l’humanité, c’est d’abord raconter son irruption dans l’histoire humaine…Dès lors, il est compréhensible que le lecteur se pose la question : cette histoire est-elle vraie ou bien est-ce une fiction à l’exemple des mythes de l’Antiquité gréco-romaine ? La réponse n’est pas simple car elle dépend de la conception que l’on a de la vérité historique, voire de l’histoire elle-même. (p. 7)

Lorsque (la) réflexion sur le sens de l’histoire se fait à partir d’une idée religieuse ou d’une révélation, on passe à la théologie. L’histoire est lue selon une vision croyante : elle est fondée sur la conviction que l’histoire dans sa globalité n’est pas le fruit du hasard mais qu’elle a son origine et sa fin dans la volonté du Dieu créateur. Fondamentalement, lorsque nous lisons la Bible, c’est à ce niveau de la théologie de l’histoire que nous nous situons. Au travers des péripéties de l’histoire humaine, nous croyons que Dieu parle et agit. (p.11)

L’histoire vue selon le point de vue de Dieu impose une lecture de la Bible qui ne se réduise pas à la simple énumération des faits bruts. Mais elle ne rend pas illégitime les questions concernant l’historicité des événements qui y sont racontés. Celle-ci ne se pose pas de la même façon pour tous les récits bibliques. Il n’en reste pas moins que si les récits bibliques n’étaient que fiction, on ne pourrait plus parler de Dieu se révélant au coeur de l’histoire des hommes (p.12).

A quelles conditions est-il possible d’affirmer que la Bible dit vrai (?) Il serait simple de répondre : parce que la Bible est parole de Dieu. La difficulté vient de ce que le texte de la Bible n’est pas directement la Parole de Dieu. Il s’agit d’abord de paroles humaines ; ce n’est qu’à travers elles que, pour les croyants, Dieu parle aux hommes. (p.13) La Bible n’est pas tombée du ciel. Elle est l’oeuvre d’écrivains avec leur contexte historique et culturel et leur génie littéraire propre. Affirmer que la Bible dit vrai suppose que soit reconnue et respectée la dimension humaine de l’Ecriture. Par ailleurs, la Bible ne s’est pas créée toute seule. Elle est due à des communautés croyantes qui ont reconnu dans ces textes des témoignages authentiques de la Parole de Dieu. (p.15)

Est-ce que tout est vrai dans la Bible ?… La véritable contestation éclata au XVIIe siècle avec le progrès des sciences de la nature… (Lors de l’affaire Galilée), des deux côtés, le raisonnement était faussé par les présupposés : d’un côté, la découverte d’erreurs dans la Bible servait de preuve que celle-ci n’est pas inspirée ; de l’autre, la conviction que la Bible est inspirée conduisait au refus de toute remise en cause des affirmations bibliques quelles qu’elles soient. (p.21)

Pendant longtemps, à ceux qui dénonçaint les données bibliques contredites par la science, les théologiens ont répondu par la théorie du concordisme : ils s’efforçaient de faire concorder à tout prix les affirmations bibliques avec les connaissances de leurs temps ; par exemple, les sept jours de la Création correspondent en fait, disaient-ils, aux sept grandes périodes de l’histoire du globe terrestre. Le concordisme n’a jamais convaincu que ses tenants ! (p.22) Devant les attaques qui se développaient au XIXe siècle avec le rationalisme, l’Église catholique a longtemps été sur la défensive et s’arc-boutait sur ses positions traditionnelles. (Pourtant), dès le début du XXe siècle, des savants catholiques ont commencé à montrer que l’utilisation de la méthode historique n’allait pas contre la foi chrétienne. (p.22) Tout n’était pas réglé pour autant : en particulier au sujet de l’histoire, très marquée par le positivisme ambiant ; certains théologiens refusaient d’admettre qu’il puisse y avoir plusieurs manière d’écrire l’histoire ; inconsciemment, beaucoup continuaient d’associer factuel et historique  : si un récit raconte ce qui s’est réellement passé, il est historique ; sinon il perd son statut… Il y a, en fait, dans l’Antiquité (mais encore aujourd’hui), des manières fort diverses d’écrire l’histoire ; intégrer l’interprétation des événements dans le récit qui en est fait oblige certes à ne pas tout ramener au factuel et à l’anecdotique, mais n’enlève pas le statut historique de ce récit  ; il a bien la prétention d’être au service de la compréhension de l’histoire.

Au sujet de la vérité de l’Ecriture, le Concile Vatican II a donné une définition qui évite les impasses… : « Les livres de l’Ecriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu pour notre salut a voulu voir consignée dans les

Lettres sacrées » (Dei Verbum § 11). La Bible enseigne la vérité en ce qui concerne le salut des hommes. Autrement dit, il peut y avoir bien des erreurs humaines concernant telle ou telle chronologie, un nom de personnage, les manières de s’imaginer l’univers, etc. mais pour tout ce qui concerne le salut de l’humanité, l’Église croit que la Bible nous transmet la vérité. (p.25). La découverte d’une part de fiction dans un récit biblique ne doit pas entacher de suspicion leur lecture ; elle nous incitera seulement à dépasser une lecture spontanément anecdotique pour rejoindre la perspective des narrateurs…Dieu se révèle au coeur de l’histoire de l’humanité, mais l’histoire en elle-même ne révèle pas Dieu. (p.77)

Le film « Amadeus » est un bon exemple de recherche de la vérité ; dans ce film, presque tout est faux : l’histoire de Salieri et de la composition du Requiem, par exemple. Or, de l’avis des meilleurs spécialistes de Mozart, il s’agit là du portrait le plus vrai qui ait jamais été fait de ce musicien de génie…Lorsque Picasso, en 1937, peint Guernica, sa production artistique dit davantage l’horreur de la guerre civile espagnole que toutes les images d’actualité. Dans la Bible, nous sommes plus proches de la production artistique que de la reproduction ; la présentation de l’histoire n’en est que plus forte car elle dépasse l’aspect contingent des faits pour ouvrir à une compréhension de ce qui est en jeu pour l’humanité. (p. 162)

La Bible n’est pas une simple parabole destinée à ce que l’homme se comprenne (tentation de la gnose qui n’y voit qu’un livre donnant la connaissance de ce qu’il faut savoir et faire pour trouver par soi-même le bonheur). (Elle) est Révélation : elle est donc indissociable de l’histoire, car c’est au coeur de celle-ci que Dieu s’est révélé. Dit-elle vrai ? Oui, mais la rencontre de la vérité suppose la complicité active et laborieuse du lecteur. (p.164)