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La libération

20 avril 2020, par Jean-Louis Cathala

Les lignes qui suivent sont des extraits, parfois commentés, du cinquième chapitre du livre de Franz Jalics : « Ouverture à la contemplation. » DDB, 2002 pp. 197-213. Ce chapitre relate une étape de cette ouverture à la contemplation. A partir de son expérience, l’auteur décrit en quoi la prière contemplative peut engendrer en nous, non pas d’emblée, mais après beaucoup de persévérance, un processus de libération. Pendant une longue séquestration avec un autre Jésuite dans les années 70 en Argentine, Franz Jalics a vécu un développement intérieur important. Les yeux bandés durant cinq mois, il a éprouvé tous les états d’âmes et les pires sentiments ; mais avec son compagnon, il n’a pas cessé intérieurement de répéter le nom de Jésus. Dans le silence de la méditation, il a vécu une expérience de purification. Il écrit  : « Le silence peut remuer tant de choses en l’homme. En dirigeant notre attention vers Jésus-Christ, nous nous lions à son pouvoir de guérison. » (p. 200) (JLC)

Chaque personne porte en soi le bien et le mal, la lumière et l’obscurité. Cependant, nous n’aimons pas prendre conscience du mal qui nous habite. Nous le refoulons dans l’inconscient et nous nous forgeons une image de nous-mêmes qui rassemble seulement nos qualités…Et pourtant, chacun emmène sa propre personne partout où il va… (Nos obscurités) influencent tous nos actes et les déterminent souvent contre notre gré. Nous voulons par exemple aimer tout le monde. En réalité, pourtant, nos relations avec les autres montrent parfois tout le contraire…Nous nous distrayons pour que (nos obscurités) ne nous troublent pas…Si un homme a refoulé beaucoup de sentiments et beaucoup d’obscurités et si ces dernières pénètrent sa conscience avec encore plus de violence, il doit employer des moyens encore plus radicaux pour les faire disparaître (addictions  ; « sainte activité »). Quelles sont ces obscurités  ? Nous les expérimentons sous la forme de sentiments négatifs chroniques  : insatisfaction, insécurité, anxiété, désespoir, colère, irritation, solitude, dépression, tristesse, déceptions, stress, sentiments d’infériorité, culpabilité, indifférence, jalousie, apitoiement sur soi. La plupart des gens attribuent ces sentiments à des événements extérieurs et ne remarquent donc pas du tout que ces obscurités viennent de l’intérieur. Les événements extérieurs sont plus des facteurs déclenchants que des causes… Le péché n’est pas seulement un acte délibéré, mais aussi, dans son sens le plus profond, tout ce qui nous sépare de Dieu et des humains. (C’est moi, JLC, qui souligne.) C’est le cas des sentiments négatifs chroniques. L’Église qualifie ces obscurités enracinées en nous de « péché héréditaire »…

La Genèse nous apprend que Dieu a crée l’être humain et a constaté que c’était bon…Après un certain temps, Adam et Eve ont commis un péché. Ils ont aussitôt été expulsés du jardin d’Éden. Il ne faut pas y voir l’expulsion de deux être humains il y a très longtemps. Il s’agit plutôt d’une description de la condition actuelle de l’être humain…sous la forme d’une histoire. Son message est que chacun d’entre nous a un bon fond. L’humain y est épanoui. Il est en sécurité, est conscient de l’amour de Dieu et découvre qui il est en Dieu….Le péché qui a suivi signifie qu’une couche obscure a entouré le bon fond de l’humain. Elle ne correspond pas au « moi » profond…Elle ne fait pas partie de l’essence de l’être humain. Pour vivre moins péniblement, il dissimule son état tourmenté derrière un voile…Il s’agit d’un mécanisme de défense…Ce voile est posé telle une plaque de béton sur notre couche obscure et, par la même occasion, sur tous nos sentiments. Impossible d’accéder à nos sentiments et à notre bon fond sans soulever cette dalle…(Le) voile est censé nous protéger contre nos obscurités…Mais le prix à payer, c’est que nous sommes séparés de notre « moi » véritable…

La vie spirituelle est divisée en deux périodes. La première est qualifiée de « précontemplative »   : Le progrès spirituel dans cette période est obtenu à force d’efforts personnels. Nous devons réfléchir, peser le pour et le contre, explorer notre conscience. (On pourrait dire, même si elles n’ont rien de directement «  religieux  », que toutes les analyses et autres thérapies relèvent de cette «  période  précontemplative  ») Bien entendu, tous ces efforts sont impensables sans la grâce bienveillante de Dieu. Et pourtant, c’est nous qui nous efforçons de progresser…C’est aussi à la sueur de notre front que nous travaillons pour le Royaume de Dieu. (Tout cela est bien sûr excellent  !)

Après un certain temps, nous passons à la phase contemplative   : Notre comportement change. Nous devons maintenant apprendre à contempler uniquement Dieu et à renoncer à tout le reste, au lieu de nous préoccuper de notre propre évolution spirituelle. Nous croyons que si nous essayons uniquement de nous tourner vers Dieu, tout le reste nous sera donné en grâce… Nous ne dépendons plus des résultats. La pression qui nous pousse à produire diminue…En deçà du voile, dans la couche d’obscurités et dans le bon fond, on ne peut ni penser ni agir…Comment peut-on se comporter  ?…Tout d’abord, on peut contempler…une activité purement spirituelle par laquelle nous ne souhaitons rien obtenir. Elle implique toujours un abandon…On peut faire confiance. On peut aimer aussi…Il s’agit de l’amour pur, qui n’attend plus rien de l’autre…En demeurant dans la contemplation, notre amour grandit tout naturellement. Enfin, on peut aussi souffrir. Le péché souffert dans la contemplation et dans l’amour est racheté et ne réapparaît plus jamais.

La méditation nous calme peu à peu…Si nous restons dans la perception en étant attentifs, le voile se soulève et nous arrivons alors dans la zone que nous avons appelée « couche obscure ». Nous faisons l’expérience de nos sentiments négatifs, qui nous séparent de Dieu et des autres humains. (Si alors) nous retrouvons nos vieilles habitudes de la pensée et de l’action…nous nous retrouvons une fois de plus…dans la zone pré-contemplative  ! Pour demeurer dans la zone contemplative, il faut rester dans la « contemplation »…Il s’agit de garder notre regard tourné vers le bon fond, vers la présence de Dieu. Nous pénétrons plus en profondeur, dans la couche d’obscurités, source de souffrances. Pour demeurer dans la contemplation, nous devons accepter et supporter ces souffrances. Toutes les souffrances vécues dans la contemplation de Dieu se dissiperont et ne reviendront plus. Notre bon fond nous éclaire et nous renforce tellement que nous avons la force de persévérer. Selon l’Évangile, la rédemption s’est faite de la même manière  : Jésus-Christ a traversé en souffrant la grande zone obscure de l’humanité. Il nous invite à le suivre et à traverser nos propres obscurités…Nous sommes sur terre pour être délivrés…Lorsqu’une personne est aimée, elle accepte et endure de mieux en mieux ses obscurités et peut ainsi s’en libérer !