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John Main – Word into silence

26 mars 2019, par Jean-Louis Cathala

John Main – Word into silence

(Morceaux choisis de Un mot dans le silence, un mot pour méditer - Le jour, 1995).

( Pour celle ou celui qui se dit chrétien, la méditation est une mise en pratique de la foi, un acte de foi et un chemin pour grandir dans une foi plus profonde et plus libre. Cependant, la méditation est ouverte à tous ! Pour celle ou celui dont la foi est distancée par rapport à l’Eglise ou qui se dit agnostique ou « non-croyant » sans être pour autant complètement fermé à la Transcendance, la méditation peut être aussi un chemin de découverte inattendue de la présence de la vie de Dieu en son coeur. NDLR)

Ce qui fait la beauté de la vision chrétienne de la vie, c’est qu’elle est une vision d’unité. En effet, dans la perspective chrétienne, toute l’humanité a été unifiée dans Celui qui est uni au Père. Dans l’union, nous devenons ce que nous sommes appelés à être. Et ce n’est que dans l’union que nous prenons la pleine mesure de notre être (p.7). Le véritable défi pour les chrétiens contemporains consiste à retrouver une voie de prière profonde qui les amènera à faire l’expérience de l’union en se détournant des distractions superficielles et de toute forme de piété imbue d’elle-même (p.10). L’expérience personnelle de Jésus est la réalité éternellement présente au cœur de chaque conscience humaine. Notre quête de connaissance, de moyens ou d’enseignements secrets est devenue inutile en raison du dévoilement du secret ultime : « le secret, c’est que le Christ est en vous ». Ainsi, lorsque nous prions, nous ne nous efforçons pas de faire advenir quelque chose, car ce quelque chose s’est déjà produit. Nous réalisons ce qui « est » en entrant toujours plus profondément dans la conscience unifiée de Jésus, dans la merveille de notre propre création. La fixation sur soi qui nous emprisonne et qui nous empêche d’entreprendre ce cheminement s’estompe lorsque nous reconnaissons que « nous possédons l’Esprit du Christ » (p.11).

Apprendre à méditer ne consiste pas uniquement à maîtriser une technique, mais davantage à prendre conscience et à faire l’expérience directe de la profondeur de sa propre nature. Le terme de « méditation » est employé dans le sens de contemplation, prière contemplative. La méditation permet essentiellement d’approfondir la relation fondamentale de notre vie : celle qui nous relie à Dieu, notre Créateur. Toutefois, la majorité d’entre nous ne peut prendre conscience de cette relation, de sa pleine merveille et de son glorieux mystère, avant d’avoir rempli une condition préalable : nous devons apprendre à être présents à nous-mêmes d’abord, à développer une relation profonde avec nous-mêmes avant de pouvoir aborder avec sincérité notre relation avec Dieu (p.15). Beaucoup de gens considèrent la méditation comme une méthode de relaxation qui les aide à conserver leur paix intérieure malgré les pressions de la vie moderne. Cette conception n’est pas fausse, mais elle est trop limitative. A mesure que nous nous adonnons à la méditation et que nous en ressentons les effets apaisants, nous nous rendons compte que la source du nouveau calme que nous éprouvons dans notre vie quotidienne est justement la vie de Dieu en nous (p.16). La méditation est un processus d’apprentissage. C’est une activité par laquelle on apprend à porter attention et à être présent. (Elle) nous permet de prendre conscience de notre infini potentiel en faisant l’expérience de la présence du Christ (p.18). Quand on médite, l’intention n’est pas d’avoir des pensées sur Dieu, sur son Fils Jésus, ou sur l’Esprit Saint. En nous détournant de tout ce qui est éphémère et sans importance, nous ne cherchons pas seulement à penser à Dieu, mais à être avec lui (p.20). Pour entrer dans cette mystérieuse et sainte communion avec la Parole de Dieu en nous, nous devons trouver le courage de devenir de plus en plus silencieux (p.21). La méditation est un état d’éveil total et attentif à la merveille de notre être ainsi qu’à celle de Dieu, lui qui crée l’être et le maintient dans l’existence ; une prise de conscience absolue que nous faisons un avec Dieu.

Voici quelques conseils simples pour bien méditer : s’asseoir confortablement…le dos bien droit…la respiration doit être calme et régulière…prenez le temps de détendre tous vos muscles. Mettez votre esprit au diapason de votre corps (p.23). Lorsque nous commençons à méditer, nous sommes aux prises avec le tourbillon de nos pensées. Le but poursuivi par la prière n’est pas d’ajouter à cette confusion en essayant de la remplacer par quelque autre flot de paroles, mais d’amener notre esprit distrait et agité au silence. Jean Cassien recommandait à toutes les personnes désireuses d’apprendre la prière continuelle de répéter sans cesse un simple et court verset (p.24) (Jean Cassien vivait au quatrième siècle ; il est le maître et la source d’inspiration de saint Benoît, et ainsi de tout le monachisme occidental). Dans la tradition orientale, on appelle ce mot mantra (p25). Dès le début, l’Église a utilisé certains mots comme mantras pour la méditation chrétienne, et je recommande à la plupart des débutants d’utiliser l’un d’eux : « Maranatha », mot araméen qui signifie : « Viens Seigneur ». Je préfère la forme araméenne à toute autre, car elle ne possède aucune connotation verbale ou conceptuelle pour la plupart d’entre nous, ce qui facilite la méditation. On pourrait aussi bien opter pour le nom de « Jésus », ou encore pour le mot que Jésus utilisait dans sa prière : « Abba ». Mais ce qu’il y a de plus important au sujet du mantra, c’est qu’il faut en choisir un et le conserver. Ne le modifiez en aucune manière, votre progression dans la méditation en serait retardée. Selon Jean Cassien, le but de la méditation est de restreindre son esprit à la pauvreté d’un humble verset. En persévérant dans la répétition fidèle du mantra, vous apprendrez de manière très concrète le sens du terme fidélité (p.26). Le processus de la méditation est la simplicité même (p.27).

Pour acquérir une conscience toujours plus claire de la présence de l’Esprit Saint priant en nous, il suffit de réciter de plus en plus fidèlement notre mantra. La répétition fidèle de notre mot intègre tout notre être (p.29). Le mantra constitue le moyen qui nous amène à vivre l’expérience chrétienne centrale, qui nous fait réaliser par notre expérience personnelle que « l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous fut donné » (Rm 5, 5) (p.34).

Pour quiconque en entend parler pour la première fois, la méditation peut sembler n’être qu’une autre forme d’introversion égocentrique à la mode. Pour le non-méditant, celui qui médite s’absorbe tellement en lui-même, et si souvent, qu’il semble plutôt faire preuve d’un narcissisme profond et malsain. En méditant, nous affirmons notre foi dans ce don qu’est notre propre création (p. 35). En devenant pleinement conscients de l’union de notre nature avec le Christ, nous devenons pleinement nous-mêmes. Nous apprenons à reconnaître qui nous sommes, et que notre vocation consiste à regarder, à contempler la divinité de Dieu lui-même, et, de ce fait, à être nous-mêmes divinisés. Pour les grands maîtres chrétiens, la prière est une découverte de soi qui transcende l’égocentrisme étroit en édifiant en nous comme un tremplin (p.36). Le seul fait de ramener le mantra à notre esprit à n’importe quel moment de la journée nous permet de nous retrouver immédiatement en présence du Créateur qui habite en nous. Apprendre à prier, c’est apprendre à vivre le plus pleinement possible dans le moment présent, à vivre le plus pleinement possible avec le Seigneur ressuscité qui est éternellement présent et nous aime d’un éternel amour. Et pour cela, nous renonçons à toute pensée et à toute image. Nous ne pensons ni au passé ni à l’avenir (p.38). La méditation est une prière de foi justement parce que nous nous abandonnons avant que l’Autre se manifeste, et cela sans aucune garantie que l’Autre se manifestera en effet (p.39). Puis vient un moment critique. (Il) survient lorsque nous commençons à prendre conscience de l’engagement total exigé par la prière qui est dépouillement de soi, lorsque nous prenons conscience de la pauvreté absolue à laquelle nous exerce le mantra (p.40).

Lorsque nous récitons le mantra, nous renonçons à notre vie pour aimer Celui que nous n’avons jamais vu. La répétition du mantra nous plonge dans un silence qui explore notre infinie pauvreté de pensée et d’esprit, un silence révélateur de notre dépendance totale envers l’Autre. Nous sommes guidés sur la voie d’une simplicité toujours plus profonde qui nous purifie (p.49). Il nous est impossible de demeurer la personne que nous étions, ou celle que nous croyions être. Dans le silence, nous nous préparons à cet éveil, un éveil qui n’est rien d’autre que la rencontre avec la plénitude et la splendeur de Jésus ressuscité (p.50). Lorsqu’il s’adonne à sa pratique de méditation quotidienne, le chrétien porte en lui cette mort à lui-même, non pas de manière obsessionnelle ou dramatique, mais en prenant conscience avec une joie grandissante que plus il meurt à lui-même dans ce vide, plus il est revivifié dans la vie transcendante de celui qui est entièrement libre : Jésus. « Bien eu contraire, encore que l’homme extérieur en nous s’en aille en ruines, l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour » (2 Co 4, 16). Nous sommes littéralement renouvelés lorsque nous entrons toujours plus profondément au centre de notre être. « Si quelqu’un est dans le Christ, écrivit Paul aux Corinthiens, c’est une création nouvelle » (2 Co 5, 17) (p.51). Dans sa signification essentielle, la méditation consiste à réaliser ceci : notre incorporation totale à Jésus-Christ, c’est-à-dire notre entrée dans le cycle de sa venue et de son retour vers le Père. Les qualités nécessaires à cette rencontre primordiale entre nous-mêmes et le fondement de notre être sont l’attention et la réceptivité (p.53). La méditation n’exige aucun talent ou don spécial, si ce n’est la détermination et le courage de persévérer (p.75).

Dans l’Évangile de saint Marc, Jésus déclare : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive » (Mc 8,34). Voilà exactement pourquoi nous méditons, pour obéir à cet appel absolument fondamental de Jésus qui constitue la base de toute notre foi chrétienne : renoncer à soi-même pour pouvoir cheminer avec le Christ dans son retour vers le Père (p.80). De nombreuses personnes, aujourd’hui comme hier, ont confondu renoncement à soi et rejet de soi. Or, la méditation n’est pas une fuite de soi, une tentative d’échapper à la responsabilité de son être, de sa vie et de ses rapports à autrui. La méditation est davantage une affirmation de soi-même, non pas du soi engagé dans telle ou telle responsabilité particulière, ou du soi qui désire ceci ou cela – ces aspects du soi sont illusoires – mais du soi où notre être irréductible existe en complète harmonie avec l’Autre, cet Autre qui est la source de notre être et celui par qui nous existons. C’est ce véritable soi, le soi complet que nous affirmons dans le silence de la méditation (p.81). L’obsession de soi-même restreint et limite le soi. Au contraire, le renoncement à soi le libère afin qu’il puisse atteindre son véritable objectif : aimer l’Autre (p.82). Faire confiance à un autre, c’est renoncer à soi et placer son centre de gravité dans cet autre. Voilà la liberté et voilà l’amour (p.88).

Le but de la méditation est de nous amener à prendre conscience de qui nous sommes, d’où nous sommes, de mettre fin à nos éternelles remises à plus tard. Nous devons demeurer immobiles. Il nous faut apprendre à porter une attention constante et continuelle à la réalité de notre être ici et maintenant. Le mantra constitue notre sacrement du moment présent (p.96). Dieu n’est pas un reflet de notre conscience, mais nous sommes son reflet, son image, par notre incorporation en Jésus, son Fils, notre frère. Le moyen de découvrir cette vérité se trouve dans le silence de notre méditation (p.101). Dans la méditation, nous développons cette capacité de tourner tout notre être vers l’Autre. Tout comme nous permettons à Dieu d’être, nous apprenons à permettre à notre prochain d’être également. Nous apprenons à ne pas le manipuler, mais à le vénérer ; en d’autres mots, nous apprenons à l’aimer (p.102).

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